Ce matin j’ai nagé avec des tortues. Non pas lors d’une sortie en mer organisée dans ce but, pendant laquelle les tortues sont appâtées pour s’approcher des nageurs. Non, simplement alors que je me baignais sur une plage peu fréquentée.
J’en ai aperçu une, petite, puis une deuxième, et puis enfin deux autres, bien plus grandes, qui se suivaient. Toujours le même scénario: une grosse tâche sombre que l’on aperçoit sous la surface de l’eau transparente : un rocher ? Non, puisque la tâche se déplace. Alors, peut-être une petite masse d’algues. Ensuite, voilà comme un petit bout de bois qui sort de l’eau. Une branche ? Non plus, puisqu’elle disparaît aussitôt. Voici donc deux indices convergents qui signalent peut-être la présence d’une tortue.
Pour en avoir le cœur net, une seule solution : nager doucement, tout en scrutant la masse d’eau turquoise transparente. Et tout d’un coup, plus de doute : la voici, à deux mètres de moi, avec sa grosse carapace qui sort de l’eau. Tellement massive et pourtant tellement légère ! Elle s’offre uniquement aux regards attentifs, l’espace de quelques secondes, puis disparaît. Pour réapparaître quelques mètres plus loin, cette fois accompagnée de sa petite famille.
C’est ainsi que pendant près d’une demi-heure, je nage sans grands mouvements dans le sillage de Madame Tortue & Famille, pour capter ces moments furtifs où les tortues pointeront leur tête hors de l’eau l’espace d’un instant, ou même m’offriront le spectacle de leur grosse carapace qui avance rapidement en battant des pattes dans cette mer turquoise cristalline. Le temps semble suspendu, plus rien d’autre ne compte que leur proximité. Comment expliquer cette émotion qui me saisit à leur vue ? Peut-être en raison de leur fragilité face aux dangers qu’elles bravent dès leur naissance et pendant de nombreuses années, avant d‘acquérir cette allure de force tranquille. De vraies battantes. Un destin à retrouver dans mon article «Une vie de tortue » https://oceaninspiration.ch/fr/ocean-blog/un-journal-qui-fait-du-bien/une-vie-de-tortue
Jihane Sfeir