Routes du Sacré - Juillet 2025

Union at Beckwith

En juillet dernier, l’espace d’une soirée, les spiritualités et pratiques sacrées africaines se sont invitées à Genève à l’initiative de l’Association Internationale des Interprètes de Conférence (AIIC) dont je suis membre, lors d’une conférence de haut vol donnée par la Professeure Yanique Hume, Directrice du Département des Etudes Culturelles de l’Université des Indes Occidentales de la Barbade (UWI-University of the West Indies-Cave Hill Campus, Barbados)

Sous le titre « Routes du sacré: migration, mémoire et géographies spirituelles de la diaspora africaine », la brillante conférencière -par ailleurs anthropologue, chercheuse, danseuse et chorégraphe, spécialiste des religions africaines- a retracé le parcours des spiritualités africaines transportées lors de la Traite transatlantique depuis les côtes de l’Afrique de l’Ouest jusqu’au Nouveau Monde dans le corps même et la mémoire des personnes mises en esclavage.

Avec son charisme exceptionnel, la conférencière a captivé son public d’une soixantaine de personnes -un exploit, pendant les vacances d’été- de plus de 20 nationalités différentes, regroupant des interprètes de conférence, des membres de la diaspora afro-caribéenne (diplomates ou fonctionnaires d’organisations internationales à Genève), des étudiants de l’IHEID (Institut des Hautes Études Internationales de Genève) et autres invités.

Pendant près de deux heures, des noms comme Orisha, Lwa, Papa Gede, Obeah, Vodun ont défilé, ouvrant les yeux sur une cosmologie africaine et des spiritualités inconnues pour beaucoup, décriées par certains et pourtant bien enracinées jusqu’à nos jours dans la mémoire et la vie de diverses populations caribéennes et américaines d’ascendance africaine.

Parallèlement, au fil de la présentation se dégageait l’influence du christianisme -et surtout du catholicisme- sur ces croyances religieuses, notamment dans l’art sacré, le culte des saints et les rituels religieux. C’est ce syncrétisme qui a permis aux spiritualités africaines de survivre dans leur nouvel environnement social et religieux.

Pour la Pre Hume, ces « Routes du sacré » -qui restent les routes de la migration contemporaine- représentent un chemin de résilience, de mouvement spirituel et de réinvention qui a permis la sublimation de la violence du Passage du Milieu et de la rencontre de l’Afrique avec l’Europe et les Amériques.

Partant, établir une cartographie de ces « Routes du sacré » permet aux populations issues de l’esclavage de retrouver leurs racines (« roots » en anglais), tout en honorant la mémoire de leurs ancêtres et la survie créative de leurs spiritualités. Explorer ces chemins est également l’occasion pour chacun de nous, quelles que soient nos origines, de découvrir un peu de Soi dans l’Autre, en prenant conscience de la similitude de nos croyances.

Jihane Sfeir

Juillet 2025